Alain Roche vide son sac à propos de sa période à la cellule de recrutement du PSG
« En tant que dirigeant, je ne suis pas sûr d’avoir pris beaucoup de plaisir pendant neuf ans. Des choses ont été bien faites, d’autres moins. En revanche, sur le terrain, ça a été les plus belles années, c’est certain. Quand vous gagnez une coupe d’Europe (la Coupe des Coupes 1996, NDLR), même si beaucoup disent que ce n’est pas la plus belle, ça marque une carrière. Quand vous êtes cinq années de suite en demi-finale de Coupe d’Europe, il faut le faire aussi. On a marqué les esprits sur certains matches, vécu des moments incroyables avec un groupe extraordinaire, un président de très haut niveau (Michel Denisot) et un public fabuleux.
Avec la cellule, on peut regretter de ne pas avoir pris certains joueurs, d’avoir pris des décisions hâtives, de ne pas avoir forcé ou dit non pour certaines choses. Mais en neuf ans, j’ai connu 9 présidents et 6 entraîneurs. Donc comment voulez-vous travailler dans de bonnes conditions ? C’est quasiment impossible. Vous devez convaincre un nouveau dirigeant à chaque fois, puis gagner la confiance d’un nouvel entraîneur. Je pense qu’on n’avait pas suffisamment d’argent non plus pour lutter pour le titre contre des équipes comme Lyon ou Marseille qui avait plus de budget que le PSG. Il y a aussi eu l’instabilité des actionnaires, avec Canal, Colony Capital, puis les Qataris qui sont arrivés. Tout ça, ce n’est pas simple à gérer.
Ce n’est pas dans mon état d’esprit d’être insultant envers les gens. D’ailleurs, quand vous ouvrez le bouquin, vous ne voyez pas d’insultes ni de critiques ouvertes. Il y a juste des faits, des anecdotes et des comportements de certaines personnes. Mais il a fallu dire les choses à certains moments. Par exemple, ça fait quatre ans que je suis parti et on ne me parle encore que des Brésiliens (Souza et Everton, recrutés en 2008), mais pas des autres. J’étais bien obligé de vous en parler sachant que j’étais responsable de l’arrivée de tous les joueurs à Paris. Aujourd’hui, on ne vous parle que des désastres. C’était très important de rappeler les erreurs qui ont été faites dans l’urgence. Ces joueurs n’ont pas été vus 40 fois, comme ça a été dit. Ça m’a permis de montrer comment ont été prises les décisions. Ce que je n’ai pas fait pendant toutes ces années où j’étais dirigeant parce qu’il fallait préserver le club et que ce n’était pas le moment de tout déballer.
Moi, j‘assume mes responsabilités. Le problème, c’est que j’étais dans un club où beaucoup de gens n’assumaient pas les choses dès que ça n’allait pas. Les décisions, elles ont toujours été prises collectivement. Le seul joueur qui a été imposé à un entraîneur, c’est peut-être Mateja Kezman. Et encore… Il y a eu un accord préalable de l’entraîneur. Quand on rabâche que le bilan est mauvais, ça finit par entrer dans l’esprit des gens. Et là, on parle du recrutement. Mais ce n’est pas ce qui nous a le plus plombé. Ce qui fait le plus mal c’est de vivre pendant deux ans avec deux morts au sein des supporters. Ça, c’est le plus dur. Sortir les Ultras du Parc des Princes a été une décision terrible, assumée par Robin Leproux et Colony Capital. À partir de là, les menaces arrivent et ce n’est plus du tout pareil. Mais on ne regrette pas ce que l’on a fait. Il fallait le faire. Mais il y a eu les insultes des supporters… Quand vous déposez des mains courantes pour du chantage, des insultes ou autres. Ce n’est pas simple. On n’en parle pas parce qu’on estime que ça ne sert à rien d’en parler, qu’il y a des choses plus terribles dans la vie. J’ai passé neuf ans au club. Il ne faut pas oublier que le club a payé aussi. Disons que c’est bien d’en parler aujourd’hui pour réhabiliter la vérité. Quand vous êtes au Paris Saint-Germain , c’est une lessiveuse. Ce qui est le plus embêtant, c’est qu’on ne vous parle que des fiascos. Mais ce n’est pas que propre au football. Dans n’importe quelle entreprise, on vous rappelle plus souvent vos échecs que vos réussites.
Même si ça n’a pas été dit, on a fait de bons recrutements. D’autres moins bons. On a été performants dans l’organisation de la formation et de la préformation avec Bertrand Reuzeau et les résultats payent aujourd’hui. Quand vous voyez le nombre de joueurs qui sont en équipe de France et en professionnel, on peut être fiers de ce qu’on a fait. Les Rabiot, les Areola, les Sakho, c’est nous. Ce n’est pas quelqu’un d’autre. Les Jallet, les Sessegnon, les Hoarau, les Giuly, c’est nous aussi. Mais personne n’en parle. C’est la vie, c’est comme ça. »