« Je ne reconnais plus mon club, son âme et donc son identité. Lescure me remplissait d’émotion, ce tas de béton anonyme me désole »
« Mon cher Jean-Louis,
Je dis « très cher » car vous êtes président du club que je chéris par dessus tout et non pas par affection. Mais également parce qu’il me coûte cher de repenser à ce mois de janvier 2016 et à tous les évènements récents concernant l’institution FCGB que je ne reconnais plus et qui se disloque au fil des mois.
(…) J’ai commencé à souffrir lorsque le projet du nouveau stade s’est accéléré. Là, j’ai pleinement réalisé que nos dirigeants se moquaient de nous ouvertement et cela ne s’est plus jamais arrêté. Les supporters, en particulier ceux du virage sud ne sont plus écoutés. Tous ceux qui connaissent Bordeaux savaient que cet emplacement était le pire de tous. Inutile d’avoir fait une école d’urbanisme pour comprendre qu’un stade de cette taille, dans un cul de sac en bord de fleuve et à proximité d’une zone commerciale au trafic saturé allait nous conduire à la catastrophe. Le jour de l’inauguration, en mai dernier, je n’étais pas serein. Vers 19h je pénètre dans le stade, je me suis tout simplement demandé où j’étais. Nice ? Lille ? Saskatoon ? Rien dans ce ramassis de béton d’une froideur incroyable ne me permettait de savoir que j’étais dans la nouvelle enceinte de mes Girondins. Quid de l’identité, de la « marque » que vous voulez soit disant créer?
(…) Quelle ne fut pas ma surprise lorsqu’à peine un mois plus tard, débarquaient à Lescure cette mascotte sortie de nulle part et les pompom girls… Le marketing du siècle dernier, à la papa, totalement dépassé comme le dirigeant que vous êtes aujourd’hui. Résultats : je passe parfois la moitié de mon trajet dans les bouchons pour sortir du stade, notre stade à un look de centre commercial et les gens le fuient. En effet, vous devriez savoir comme moi qu’un « client » mécontent parle beaucoup plus que celui qui est satisfait. Avec le désastre pour y accéder et en sortir lors de l’inauguration, il fallait s’y attendre.
(…) Mais tout va bien, vous avez déclaré dans L’Equipe du 29 janvier dernier que ce n’était pas si mal puisque les loges étaient occupées à 85%. Le business est certes indispensable. Mais quel est l’intérêt pour les entreprises de venir dans un stade qui devient au fil des mois la risée de la France du football ? Je suis un très mauvais « client », mon seul achat dans la boutique du club date de mon premier match, une écharpe que j’abordais encore fièrement jusqu’à il n’y a pas si longtemps à chaque match. Les milliers d’euros dépensés pour assouvir ma passion pour ce club n’allaient pas dans votre poche mais dans celle d’ASF, Total, BP et autres Shell. Sans vous parler des dizaines (la centaine?) de milliers de kilomètres parcourus…
Je ne vous reproche pas ici la politique sportive du club. Cela ne m’empêche pas d’avoir un avis sur ce sujet mais il me faudrait trouver un éditeur qui accepte le livre que je suis capable d’écrire. Non, vous êtes bien en train de tuer l’identité du club, son histoire et la passion de milliers d’autres personnes comme moi. Aujourd’hui, je n’ai plus le courage d’avaler les 400km que je dois faire pour un match des Girondins et c’est avec une immense tristesse que je ne renouvellerai pas mon abonnement en août prochain. Je rejoindrai donc les gens qui viennent occasionnellement et qui partent 10 minutes avant la fin pour éviter les bouchons.
Je ne reconnais plus mon club, son âme et donc son identité. Lescure me remplissait d’émotion, ce tas de béton anonyme me désole. Réagissez ou les affluences vont continuer de s’étioler et surement bientôt le football dans cette ville qu’est Bordeaux. L’UBB, quoiqu’elle en dise, s’en frotte les mains… »