Raphaël Brosse (Footballski) nous dit tout sur Videoton
Le podcast de l’entretien avec Raphaël, et de l’émission GA, est à écouter ICI.
Les articles de Raphaël, qu’on remercie pour sa disponibilité et ses analyses, sont à lire ICI.
Pourquoi il suit le championnat et le foot hongrois :
« Ma passion pour la Hongrie ? Elle n’est venue que récemment, sur le tard on va dire, même si je m’intéressais à l’Europe de l’Est en général. Je ne suis pas d’origine hongroise, loin de là même, et c’est du côté de Varsovie, en Pologne, que j’ai travaillé. Donc j’avais quand même des accointances avec cette zone géographique, mais c’est surtout pendant l’Euro 2016 en France ; lors d’un match à Bordeaux justement ; que j’ai accroché. Je suis allé voir Autriche – Hongrie et j’ai apprécié le jeu des Hongrois, et les supporters. Alors j’ai suivi et c’est resté, car le championnat est intéressant. »
La présentation générale du club de Videoton :
« Le nom actuel du club est utilisé depuis 2011, mais le nom Videoton traîne dans celui du club depuis les années 60. A la base, c’est un partenariat avec un sponsor, une entreprise, et le nom est resté. Puis c‘est plus simple à dire que nom de la ville : Székesfehérvár. Historiquement, Székesfehérvár est une ville importante du pays, mais comme le club n’est pas situé à Budapest, la capitale hongroise, ce n’est pas forcément le grand rival de Ferencváros, qui est le plus grand club de Hongrie et a beaucoup de rivaux locaux. Cependant, sur la période récente, les deux se tirent la bourre. » Pour info, la saison dernière, Videoton a terminé 2ème du championnat, à 3 points derrière… le Budapest Honvéd.
Aussi, Videoton est quand même un club qui a fait de très belles choses en Europe : « En 1985, ils vont en finale de la Coupe UEFA, contre le Real Madrid. C’était un format aller-retour à l’époque, et ils avaient perdu 3 à 0 à domicile lors du premier match, mais ils avaient gagné 1 à 0 au retour, à Santiago Bernabéu, donc ils étaient tombés avec les honneurs, d’autant plus qu’ils avaient éliminé Manchester United en quart de finale. Et ils avaient aussi sortis le Paris Saint-Germain l’année d’avant. Récemment, ils ont fait souvent des tours préliminaires européens, et une poule, il y a 2 ans, donc ils ont un peu l’habitude de ces matches-là, mais leur niveau maximum c’est d’atteindre la phase de poules de la Ligue Europa. Aller plus loin, ce sera compliqué pour eux. »
Marko Nikolić, nouvel entraîneur de Videoton.
Son avis sur la double opposition face aux Girondins :
« Sur le papier, Bordeaux est largement au-dessus et doit passer ce tour sans souci, mais Videoton a très peu changé à l’intersaison, ils ont des automatismes, de la stabilité. L’équipe tourne très bien telle qu’elle est, ils vont arriver lancés alors que Bordeaux sera encore en rodage. La saison en Hongrie a déjà repris, et Videoton a même commencé la sienne mi-juin, avec le 1er tour préliminaire de Coupe d’Europe. Physiquement, ils enchaînent bien les matches en ce moment, ce qui n’est pas évident, et le coach a fait tourner contre Kalju, au match retour du tour précédent de Coupe d’Europe, car ils avaient gagné 3 à 0 là-bas à l’aller et étaient donc déjà presque qualifiés. Par contre, Videoton commence déjà à avoir des pépins physiques, puisque le défenseur Paulo Vinícius, un brésilien naturalisé hongrois, est blessé. C’est plutôt une bonne nouvelle pour Bordeaux, car c’est un cadre de l’équipe. Mais sinon, Videoton carbure au rythme d’un match tous les trois jours, donc ils sont chauds. Mais ils devraient caler physiquement d’ici fin août je pense. »
Marco Caneira, Bordelais de 2002 à 2004, a terminé sa carrière à Videoton !
L’effectif de Videoton :
« Au niveau de leur effectif, ils ont quand même recruté un peu, mais leur 11 de départ n’a que très peu bougé, donc méfiance. Devant, ils ont deux attaquants internationaux serbes, très efficaces et complémentaires : Danko Lazović et Marko Šćepović. C’est la doublette offensive du championnat, alors attention pour Bordeaux ! Il y a aussi Loïc Nego, un Français, qui joue latéral ou milieu droit. Il a été formé à Nantes ; votre voisin de l’Atlantique que vous aimez tant (sourire) ; et il s’épanouit en Hongrie, après avoir pas mal voyagé et été prêté. Il a fait une saison très complète l’an dernier.
D’autres joueurs à suivre ? Il y a donc les deux attaquants serbes, qui combinent bien ensemble, et Nego, qui fait de bons débordements, mais manque un peu de précision dans les centres et les passes ; et sinon… Il y a Roland Juhász, défenseur et capitaine, que ceux qui suivent l’équipe nationale de Hongrie devraient connaître. Je crois qu’il sera d’ailleurs content de retrouver le Matmut Atlantique après l’Euro de l’an dernier. En fait, vu que les cadres de l’équipe sont assez âgés, il n’y a pas vraiment de jeunes pépites. Moi, j’aime bien Asmir Suljić, milieu de couloir, qui a un bon pied gauche et donne des centres intéressants, en amenant de la fluidité et en essayant de trouver les décalages. Ianique Stopira ? Effectivement, c’est pour Yannick Stopyra, qui a joué dans les deux grands clubs du Sud Ouest (sourire)… Et c’est un autre bon joueur de cette équipe, qui fait le travail comme arrière gauche, qui monte très vite. Il sera aussi à suivre. J’ajoute qu’il y a un ancien de chez vous, le défenseur Marco Caneira, qui a joué à Videoton de 2011 à 2015. »
Danko Lazović, ex attaquant du Feyenoord
Rotterdam, du Bayer Leverkusen, du PSV Eindhoven et du Zenit
Saint-Pétersbourg, est l’attaquant vedette de Videoton.
Le niveau de Videoton par rapport à celui d’un club français :
« En termes de niveau de jeu, s’il fallait comparer avec un club français, je pense que Videoton aurait du mal à se maintenir en Ligue 1 sur une saison, car il y a vraiment un gap entre les deux ligues. Mais, encore une fois, c’est dur de comparer, car les styles de jeu dans les championnats sont durs à évaluer les uns par rapport aux autres, surtout quand on part à l’Est. Par contre, niveau style de jeu, je ne crois vraiment pas ; car ce n’est pas dans les habitudes de l’équipe, du club et du nouveau coach, le serbe Marko Nikolić, qui a été champion avec le Partizan Belgrade ; qu’ils mettront le ‘bus’ derrière. Mais ce n’est jamais sûr non plus, peut-être que je me trompe. Un prono pour jeudi ? Je suis partagé. Je ne pense pas que ce sera une boucherie. Pour moi, le score idéal en vue d’une qualif’ de Videoton serait un 2 à 1 pour Bordeaux. Et ce n’est pas impossible que ce soit le cas. »
Les points forts et faibles de cette équipe :
« Le point fort de Videoton, par rapport à un point faible bordelais, ça peut être le côté droit, donc la côté gauche de la défense girondine. Avec Loïc Nego qui n’hésite pas à dédoubler, à déborder, à faire des appels, ce côté est bon chez Videoton. Devant, Šćepović a du gabarit, au sein d’une attaque toujours à deux pointes, et peut peser sur la défense, même si je ne sais pas quelle charnière va aligner Jocelyn Gourvennec. Danko Lazović, lui, décroche davantage et joue en soutien, légèrement en retrait, mais comme Videoton joue sans numéro 10, dans un 4-4-2 à plat, les deux attaquants percutent bien. Au milieu, il y a deux joueurs à vocation assez défensive : Anel Hadžić et Máté Pátkai, qui se battent sur chaque ballon pour le récupérer et le conserver. A mon avis, quelques cartons jaunes vont pleuvoir dans la bataille. Offensivement, il n’y a pas vraiment de créateur qui va trouver une ouverture formidable, mais le milieu est dense et les côtés sont dynamiques, avec plusieurs solutions pour l’entraîneur…
A l’inverse, le point faible des Hongrois devrait être leur charnière centrale, qui sera à remodeler du fait de la blessure de Vinícius, qui a fait une énorme saison dernière. Je pense qu’il sera remplacé par András Fejes, mais je ne sais pas comment cela va se passer pour les automatismes, surtout que l’attaque bordelaise aurait quand même de quoi faire tourner les têtes de quelques défenses… Et il y aura des failles à exploiter. Aussi, je note que Videoton a un peu de mal à rentrer dans ses matches et qu’ils ont déjà pris des buts rapidement cette saison. On verra si ce sera le cas jeudi. »
Un 11 de départ récent de Videoton.
Le football en Hongrie :
« En Hongrie, il y a une forte influence allemande au niveau du football, car les deux pays sont assez liés, avec beaucoup d’entraîneurs allemands qui viennent en Hongrie et les meilleurs joueurs hongrois qui vont en Bundesliga. Au niveau du jeu, c’est physique, bien sûr, mais il y a des espaces, une vraie volonté de jouer, des tirs de loin, donc c’est assez agréable à suivre, même si ce n’est pas du grand football que l’on voit tous les jours. Mais Videoton est l’un des top clubs en Hongrie, et un joueur qui explose là-bas part ensuite ailleurs, à l’étranger. Du coup, leurs meilleurs joueurs actuels sont généralement assez vieux, et s’ils partent c’est pour aller dans les pays du Golfe (sourire). Ce n’est pas nécessairement un club formateur, car ils récupèrent les bons joueurs du pays, allant se fournir ailleurs. »
L’ambiance :
« Les supporters ? Non, ça va. Il ne faut pas craindre l’ambiance, et ne pas confondre l’engouement pour l’équipe nationale, où il y a une grande ferveur, et le public du quotidien, qui va voir les matches de championnat, qui sont beaucoup moins suivis. Au retour, ça se jouera dans un petit stade de même pas 4 000 places, donc n’attendez pas une ambiance surchauffée comme en Croatie ou en Serbie, même si ce sera quand même un match-piège pour Bordeaux. Mais, pour moi, même si c’est dur de donner un pourcentage et que je ne suis pas bon en pronostics, Bordeaux a seulement 10 à 20% de chances d’être éliminé. Il y a quand même un écart de niveau entre les championnats, bien que ce soit délicat de comparer. En plus, je n’ai pas trop suivi les matches amicaux, mais je trouve que Bordeaux réalise plutôt un bon mercato. En tout cas, c’est clairement Bordeaux qui a tout à perdre et qui concentre tout l’enjeu du match, car Videoton est dans une approche différente et n’a aucune pression. Ils disent en conférence de presse n’avoir rien à perdre, y aller pour tenter un coup, pour faire honneur à la Hongrie, pour tenter d’améliorer le coefficient UEFA du pays, car ils sont déjà le dernier club hongrois engagé en Coupe d’Europe… Pour eux, jouer Bordeaux, c’est du bonus. Ils sont surtout contents de recevoir au retour. Ailleurs en Hongrie, je ne sais pas trop comment le tirage a été perçu, car j’avoue ne pas avoir fait une revue de presse complète ; en plus, quand le tirage a été fait, la qualification n’était pas encore certaine. Mais les Hongrois, en Coupe d’Europe, ont conscience d’être un peu dans la posture de David face à Goliath, ils le savaient, car Videoton n’était pas tête de série pour le tirage. »
Roland Juhász, défenseur et capitaine de Videoton, avait éliminé Bordeaux de la C3,
en 2008, avec Anderlecht (Belgique).
Le climat :
« En hiver, la trêve dure deux mois et demi, car il fait très froid, mais en été il fait chaud voire parfois très chaud, un peu comme chez nous en fait. Pour l’instant, la météo annonce qu’il fera 31 degrés le soir du match retour, le 3 août, mais d’ici là ça peut changer. »