Willy Sagnol – entraîneur
Successeur de Francis Gillot au poste d’entraîneur du FC Girondins de Bordeaux, Willy Sagnol (37 ans) est à la fois l’attraction et l‘énigme de ce Bordeaux en reconstruction, à un an de l’entrée de l’entrée dans le Nouveau Stade. Si le joueur a largement fait ses preuves, les capacités de management et les idées tactiques du Willy Sagnol entraîneur posent de nombreuses questions. Mais en se penchant bien sur le parcours, le profil, et les dires du concerné, les doutes et les interrogations se dissipent quelque peu.
Oublié le buzz spéculatif – même si des contacts existaient bel et bien – autour de Zinédine Zidane et le tollé de sa non-venue, c’est finalement Willy Sagnol qui sera donc le nouvel entraîneur des Girondins de Bordeaux. Une solution dont certains diront qu’elle est par défaut, mais qui semble pourtant aussi intéressante, voire même plus, que celle de Zidane pour ce qui est du profil de coach et du projet à moyen terme pour le FCGB.
Retraité très jeune en 2009 (juste avant ses 32 ans), la faute à des blessures récurrentes au tendon d’Achille et au genou, celui qui a ensuite été consultant médiatique, membre du Conseil de Surveillance de l’AS Saint-Étienne (son club formateur) et recruteur au Bayern Munich avant de devenir, en 2011, manager des équipes de France de jeunes, puis, en 2013, sélectionneur des U20 et des Espoirs, a toujours fait preuve d’un esprit d’initiative et d’un franc parler à part dans le paysage du foot français. Latéral droit de très haut niveau durant une carrière pro (1995-2009) où il n’aura connu que 3 clubs – Saint-Étienne, Monaco et le Bayern Munich -, l’international aux 58 sélections semblait, de par son calme, son leadership naturel, son professionnalisme, mais aussi son intelligence à comprendre le jeu et l’évolution du foot, prédestiné à embrasser une carrière sur le banc et à s’engager vers cette voie pour continuer d’apporter au football.
« Ambitieux pour le club et les joueurs, avec forcément des objectifs qui seront élevés… Les places entre 3ème et 6ème »
« J’ai été régulièrement en discussion avec lui concernant des joueurs de notre effectif à Marseille susceptibles d’être retenus en sélection. J’ai vu qu’il était bien un homme de principes, très attaché à la mentalité, à la manière de se comporter sur mais également en dehors du terrain. Il a de très bonnes valeurs éducatives. C’est quelqu’un qui transmet ce qu’il a été en tant que joueur : rigoureux, attentionné. Il aime la discipline. Il ne faut pas oublier qu’il a évolué plusieurs années en Allemagne » déclarait récemment Élie Baup, qui l’a lancé en pro à l’ASSE, au sujet de l’ancien N°19 des Bleus. Une description qui explique en partie pourquoi Bordeaux, comme avec Laurent Blanc en 2007, a décidé de lui donner sa chance pour lancer sa carrière comme coach de club, et qui rejoint ainsi les envies de « fraîcheur, jeunesse, punch et dynamisme » annoncées par Jean-Louis Triaud. De plus, celui qui a ouvertement déclaré « Ne pas avoir passé autant d’années au Bayern Munich sans développer un côté très ambitieux » et être donc « ambitieux pour le club et les joueurs, avec forcément des objectifs qui seront élevés… Les places entre 3ème et 6ème » colle parfaitement à l’impératif, tant sportif que financier, d’intégrer, de faire progresser et de révéler – en collaboration avec un staff de formation renforcé par Ulrich Ramé en tant que Directeur de la Performance – les nombreux jeunes joueurs prometteurs de l’effectif bordelais et de la réserve.
Mais qu’on ne s’y trompe pas, Sagnol n’est pas venu à Bordeaux uniquement pour gérer un groupe rajeuni. Et s’il nie avoir demandé ou obtenu les fameuses « garanties » formelles de recrutement, le nouveau coach des Girondins semble convaincu qu’il aura les moyens de renforcer Bordeaux avec des joueurs confirmés, pour y reconstruire une équipe dans laquelle plusieurs départs (notamment ceux des « indésirables » en fin de contrats) vont permettre un renouvellement plus facile : « Hors de question de faire venir des joueurs juste pour les faire venir. Aujourd’hui, il y a des positions sur le terrain que nous avons ciblé et que l’on veut absolument renforcer. Et ce sont ces joueurs-là qui viendront en priorité (…) Il va y avoir beaucoup de travail. Il y a un effectif déjà très intéressant avec de bons joueurs. D’autres joueurs vont certainement arriver dans les semaines qui arrivent. »
« Au niveau des profils de joueurs (…), c’est surtout les qualités d’intelligence et d’adaptabilité qui m’intéressent »
Pour ce qui est du jeu et du style Sagnol, visiblement audacieux, ainsi que de son mode de management, qu’on devine ferme et exigeant mais compréhensif, ses propos tenus fin 2012 dans un entretien avec Lionel Rosso pour Yahoo !, ou encore son interview accordée à Infosport + en octobre dernier, donnent quelques premiers indices assez clairs sur sa façon de voir le football et ses attentes vis-à-vis de ses joueurs…
Si elles n’étaient, évidemment, pas absentes sous Francis Gillot, les valeurs de travail et de rigueur dans le comportement et l’état d’esprit seront de mise avec Willy Sagnol, agrémentées sans doute d’un ton plus entraînant et d’une personnalité plus jeune, que les joueurs bordelais devraient facilement accepter et respecter vu l’immense carrière qu’a eu, il y a encore quelques années à peine, celui qui va désormais être leur coach. Voici donc, quelques extraits de ce à quoi ressemble le discours du Willy Sagnol entraîneur :
« L’ambition de ne pas fermer le jeu et d’attaquer, c’est ce que toutes les équipes de première ou bien même de deuxième division devraient avoir. Travailler les séquences offensives, c’est ce qu’il y a de plus dur pour un entraîneur et une équipe. Maintenant, avec les sélections de jeunes des Bleus, on essaye de mettre en pratique certains principes de jeu au niveau des entraînements et du travail tactique. Je demande à tous les sélectionneurs de partir d’un postulat offensif, avec la possession de balle. Défensivement, je pense que les qualités des joueurs feront qu’on tiendra toujours la route.
(…) Plus que la seule influence du Bayern, l’influence allemande est présente en moi. Les Allemands ont très bien réussi la transition entre le football comme sport professionnel et comme spectacle en même temps. Ils sont restés dans l’optique de faire plaisir au public tout en ayant des résultats positifs. Il y a une culture générale, le foot est une religion, c’est différent de chez nous. Les gens vont dans les stades en famille, les taux de remplissage et le nombre de buts par match sont les plus élevés d’Europe. Il y a tout pour être heureux niveau foot ! En France, on a le savoir-faire, le potentiel, mais il faut juste avoir la volonté de réussir.
(…) Je ne veux pas imiter le modèle espagnol ou bien hollandais car nous n’avons pas le même genre de joueurs. En France, comme au Brésil, le vivier est extrêmement important et varié. Au niveau des profils de joueurs, on peut faire énormément de choses. A titre personnel, c’est surtout les qualités d’intelligence et d’adaptabilité qui m’intéressent. En Espagne ou en Allemagne se sont souvent les mêmes systèmes de jeu qui sont utilisés… Moi, j’aimerais que les systèmes évoluent, avec pourquoi pas des défenses à 3 ou des retours à 2 attaquants au lieu d’un seul. Un joueur qui aura touché à tout pourra s’adapter dans sa carrière et sera plus intelligent. Mais le système sera aussi fait en fonction des qualités de nos joueurs qui seront à disposition. »
« Le plus dur dans le métier, je dirais que c’est d’annoncer à un joueur qu’il va en tribune. Quand il est envoyé sur le banc, il a encore l’espoir de rentrer, de jouer, d’apporter sa pierre à l’édifice, mais quand on doit dire à quelqu’un qu’il n’est ni sur le terrain, ni sur le banc, c’est compliqué humainement. (…) Je n’explique pas toujours mes choix aux joueurs car s’expliquer c’est un début de justification, et un entraîneur qui se justifie sans arrêt il ne prend plus de décisions à la fin. (…) Comment demander à un gamin de 20 ans d’être irréprochable, quand nous, trentenaires ou cinquantenaires, ne le sommes pas non plus ? C’est difficile. Il y a beaucoup de responsabilités sur les épaules des joueurs. Ils savent que quand il y a une erreur, il y a une sanction, mais ça ne veut pas dire qu’on leur coupe la tête au bout d’une erreur. »
En attendant de voir dans les faits, sur le terrain, dans la communication et dans la manière, si la méthode Willy Sagnol répond aux attentes et porte ses fruits aux Girondins pour définir et réaliser un projet de jeu et de résultats avec une équipe qui devrait bien bouger cet été, l’espoir et les promesses que suscite sa venue sont déjà un message très positif. Celui qui le club a envie de (re)prendre les choses en main et d’agir pour redorer un blason terni ces derniers mois et relancer une passion endormie.