Amour des Girondins, Las Vegas, confrères critiqués, van Dijk, Zidane et manques de résultats : Albert Riera, le Guardiola de Wish ?

Nommé entraîneur des Girondins au mois d’octobre dernier, Albert Riera était arrivé au club avec un discours fort en terme d’ambition et plein d’amour pour le FCGB. Sept mois plus tard, l’espagnol n’a pas su faire décoller les Girondins et a surtout marqué par ses choix et sa communication illisibles.

Rétrospective.

Côté terrain, l’entraîneur espagnol était arrivé avec de nombreux systèmes de jeu en tête et ne s’en était pas caché. D’entrée, il a affiché une attitude positive, une méthode Coué, pour repartir de l’avant :

Il faut rester très positif. Si je me présente face à la presse ou aux joueurs en baissant la tête, je ne pense pas que j’aurai de meilleurs résultats dans l’ensemble.

Côté joueurs, s’il découvrait un groupe sur lequel il n’avait pas eu la main, Riera se disait satisfait. Ses propos au début novembre :

Je suis content des joueurs que j’ai. J’en ai parlé avec Admar. Il y a une équipe où à chaque poste j’ai deux joueurs différents.

Décalage entre discours et réalité, Riera s’entête

Mais les systèmes de Riera et sa défense hybride, notamment, ne prennent pas. Son choix de maintenir Straczek coûte des points. À plusieurs reprises. L’entraîneur bordelais sort l’une de ses premières déclarations loufoques : Si Rafal Straczek fait des boulettes ? Et Zinédine Zidane au Mondial ? avant d’enchaîner : Le Bastia style, on ne le jouera pas avec moi, déclare-t-il aussi fin novembre. Au mois de février, une pensée pour Troyes : Si mon équipe jouait avec le style de Troyes, je me ferai critiquer.

La question de maintenir Riera se pose déjà début décembre. Les Girondins décident de faire une Lopez/Guion en maintenant un homme qui ne convainc pas, et surtout, lui donnent plus de pouvoir. En premier choix (ou en contre-partie avec sa direction) les Girondins reviennent à une organisation de jeu plus classique et surtout plus adaptée au niveau de l’équipe. Deux mois, ou presque, de perdus.

Mais les résultats peinant à s’enchaîner, Albert Riera continue malgré tout son discours positif. En total décalage avec le nombre de points pris pour les Girondins : Sur le match à Auxerre, le 15e a joué chez le premier et sur le terrain je n’ai pas vu la différence. S’appuyant trop sur le contenu et pas sur le retard pris au classement, Riera a été à contre-courant : On a fait des erreurs qui nous ont coûté 3 buts mais à la fin on aurait pu aussi marquer (propos après Auxerre-Bordeaux).

En interne, la positive attitude et les choix tactiques n’ont pas tardé à perforer le vestiaire. Stian Gregersen en première victime. Marqué par des propos de son entraîneur pendant un match, le norvégien prendra la porte et s’exilera aux États-Unis.

L’agent de Stian Gregersen ? Mais c’est qui lui ? Quel est son nom ? Je ne vais pas participer à rendre populaire quelqu’un qui veut figurer dans la presse parce qu’il parle de moi, se signalera Albert Riera en conférence de presse.

Côté individuel, certains joueurs auront tout de même performé sous Riera : Johnsson replacé dans les buts et qui doit peut-être sa forme grâce à son talent mais aussi et surtout Danylo Ignatenko au début 2024, devenu, le frère des défenseurs centraux selon son entraîneur suivis de Pedro Diaz ou encore Zuriko Davitashvili. Oui, Riera a su tirer le meilleur de certains de ses joueurs.

Très protecteur envers son groupe, Riera continue d’enchaîner les métaphores entre son équipe, ses joueurs et celles et ceux de Top niveau :

Emmanuel (Biumla) il fait un bon match c’est Beckenbauer, la semaine d’après il fait une erreur et on le casse. Dernièrement, on a vu l’un des meilleurs matchs du moment avec Arsenal-Liverpool et vous avez vu l’erreur de van Dijk qui est pourtant l’un des meilleurs ?

Sur le nombre de passes contre Bastia, on en a fait plus que Manchester City contre le Real Madrid.

Côté communication, Albert Riera a sa touche. Mais ne s’étend pas sur les réseaux sociaux. S’il a un compte sur X, l’ancien joueur des marine et blanc en reste détaché et fait passer ses messages aux journalistes :

De manière générale, on m’informe de ce qu’il se passe à l’extérieur : dans la presse, sur les réseaux sociaux comme Instagram et Twitter. Et c’est très bien, j’en suis très heureux ! Ici, on n’est pas dans un bar : chacun ne vient pas pour donner son opinion.

L’opinion des autres, Albert Riera n’en a visiblement que faire. Pire, il n’aura pas hésité à critiquer ses confrères entraîneurs et leurs styles de jeu. Régis Brouard (Celui qui a dit ça, aujourd’hui, il n’est plus en poste), Omar Daf, David Guion ou encore Jean-Louis Garcia (QRM). Et ce n’est pas mieux aux abord des terrains à l’image de la rumeur de la gifle qui aurait été donnée par l’entraîneur bordelais à un joueur de l’AS Saint-Étienne dans les coursives. Riera signera une nouvelle décla choc et en décalage en après match : Ce qui se passe à Las Vegas reste à Las Vegas. Depuis, la rumeur s’est étouffée.

Des ambitions à la baisse, Riera lance sa campagne

Arrivé avec l’ambition de faire remonter son équipe en Ligue 1, l’entraîneur bordelais a déchanté en communicant tardivement sur des ambitions à la baisse. Tout un club se sera résigné de viser les deux première places (en tout début de saison, avant l’arrivée de l’entraîneur actuel), puis le Top 5, la barre des 50 points à la fin avril et enfin le maintien. Si le programme des ambitions a certainement du être annoncé plus tôt en interne, force est de constater qu’il fait mal pour ce FCGB. Et Albert Riera n’est clairement pas le seul responsable. Le niveau de ses joueurs et le manque de moyens avec un mercato hivernal inexistant ne sont surtout pas à oublier.

Mais Riera garde sa part de responsabilité comme il l’a reconnu avant la J38 et la réception de Pau (Je suis responsable mais pas coupable). En attendant, l’espagnol a doucement mais sûrement balisé le terrain pour postuler à sa propre succession la saison prochaine.

D’abord, il a désigné quelques coupables. Il a réduit sa responsabilité du travail actuel en mitraillant David Guion et l’ancien staff au mois de février dernier :

Quand on arrive dans une équipe, en général, on remercie le travail qui a été fait avant, la base présente. Mais je ne peux pas apprécier ce qu’il y avait avant. C’est la vérité. Je devais travailler beaucoup sur les terrains et surtout beaucoup en dehors.

Ensuite, il a rappelé la justesse de son effectif face à la liste de blessés et d’absents qui s’accumulait :

Quand je suis arrivé, j’avais un effectif bien fourni avec des postes dédoublés. L’équipe était bien équilibrée. Mais c’est vrai qu’aujourd’hui la donne est différente surtout qu’on a perdu des joueurs cadres comme Vital, Gaétan ou encore Alberth.

Un point pour Riera. Pour autant, Vital Nsimba n’a pas livré un récital cette saison et que dire du niveau de Gaétan Weissbeck dont il louera pourtant les qualités au point de vouloir partir en vacances avec lui. Au milieu, Issouf Sissokho et Yohan Cassubie ont été laissé de côté tout comme Mathias De Amorim avant sa blessure. Lui finalement devenu un joueur 360° au style adoré par son entraîneur sur la toute fin de saison. Une opération de communication plutôt qu’un réel ressenti ? Ce ne serait pas la première fois que les Girondins feraient appel et joueraient du discours de la formation pour masquer leurs futurs manques financiers.

Face au tableau d’ensemble, Albert Riera se lance sur un nouveau terrain et glisse quelques critiques envers sa direction. Mesurées et bien placées pour le coup :

Quand les attentes sont très hautes – ce qui est bien car il faut une motivation – il faut déjà voir si les attentes sont réalisables. Si on le l’accepte pas, on perd. On ne peut pas rêver trop haut alors qu’en réalité on est à un pallier plus bas. déclare-t-il avant la réception du Paris FC, fin mars.

L’entraîneur sort donc du périmètre de son groupe, de ses choix tactiques, de ses joueurs ou encore du travail réalisé avant son arrivée pour jeter une première pierre. Sur le fond, n’a-t-il pas raison ?

Alors que les résultats restent plus que moyens, les bordelais se dirigent péniblement vers la fin de saison. En conférence de presse d’avant match contre Ajaccio, Riera surprend et annonce être sur de rester aux Girondins la saison prochaine. Le technicien se reprendra ensuite, barrière de la langue sûrement, pour confirmer qu’il est convaincu de vouloir rester au club pour mener la mission de la montée en Ligue 1 à terme.

Ses échecs de la saison actuelle ? Il n’est pas arrivé dans un/son projet et il est arrivé en cours de saison à un moment difficile. Face à l’absence de communication aux étages supérieurs (Admar Lopes, Gérard Lopez), Riera monopolise et centralise la communication. Pourquoi s’en priverait-il ? Rebelote avant la réception de Pau. Si sur l’aspect pur du match, il y a peu à dire de par l’absence d’enjeu, l’entraîneur bordelais appuie son offensive sur sa campagne et ses critiques :

Quand je suis arrivé au mois d’octobre, on m’a dit que ce serait mon projet. Au final, on est la seule équipe qui n’a pas recruté en hiver. Les entraîneurs dépendent des joueurs, c’est important. […] On sait qu’il y a le passage devant la DNCG qui ne sera qu’au mois de juin. En attendant, c’est long. On a une conversation WhatsApp avec le président. Sur les questions de recrutement ? C’est silence.

Appuyant le jeu de possession de son équipe (sans en mentionner la stérilité), Albert Riera a dressé une lettre de motivation plutôt qu’un constat sur les manques de son effectif et de ses principes. Une pointe de manque d’humilité qui colle à un personnage dont l’image se sera ternie de journée en journée en Ligue 2. Enfin, pour se sortir d’éventuelles critiques sur son travail réalisé en tant qu’entraîneur, Albert Riera est même allé jusqu’à se défaire de l’étiquette de son propre métier en se disant meilleur manager de vestiaire qu’entraîneur :

Manager général (répondant au journaliste, ndlr) ? Ce serait le plus beau mais cela doit se gagner. Je dois gagner la confiance, le crédit pour avoir les clés du Haillan, du stade, de tout. j’étais très occupé avec mon équipe. Peut-être que je n’ai pas pris assez de temps avec les équipes réserves, de jeune, la cuisine (diététique ?). Mais cela prend du temps. On ne donne pas les clés de sa maison à n’importe qui. Si ce moment arrive, je serai content.

En résumé, Albert Riera se dit prêt à tout pour aider le club et ce à n’importe quel poste ambitieux. Difficile de lui en vouloir tant son désir de remettre les Girondins sur le devant de la scène est palpable tout comme son amour pour le club au scapulaire. Mais en a-t-il les capacités ? Et avant tout, a t-il la lucidité pour reconnaître ses limites ? Moins sûr.

Le bénéfice du doute ?

Tant qu’il y a de la vie…

À cette heure, le club des Girondins de Bordeaux est encore au niveau professionnel et garde des petites chances de le rester. Le choix de Gérard Lopez d’avoir remplacé David Guion par Albert Riera était osé. Il n’a pas payé. Découvrant la Ligue 2 et le métier d’entraîneur en Europe, Riera a pris ses marques et perdu du temps. Des points. Peut-être qu’avoir tenté ce choix l’été dernier en tout début de préparation, avec une confiance et un rôle accordés sur le recrutement auraient changé la donne. Et même : si ses idées n’avaient pas fonctionné et qu’il avait perdu deux mois, ceux-ci auraient été perdu d’entrée d’exercice laissant donc plus d’une demi-saison pour repartir de l’avant. Mais la situation est toute autre aujourd’hui et Riera a déjà prouvé qu’il ne savait pas s’adapter.

À cette heure, la question n’est plus de savoir s’il a été un bon ou un mauvais choix. La note est salée au travers de ce bilan mais en tant que candidat a sa succession, Riera doit assurer. Chose qu’il n’a peu faite jusqu’à présent. Enfin, rappelons qu’il n’est pas le seul coupable (car, oui, il l’est en partie) de cette longue descente des Girondins. Aujourd’hui, l’essentiel est ailleurs. La survie d’un club se joue.