Un tunnel qui les fait tous parler…

Pour France Football et pour Sud Ouest, plusieurs anciens grands noms des Girondins de Bordeaux ont raconté leurs souvenirs du fameux tunnel de Lescure, qui sera très bientôt un souvenir pour les Bordelais. Ceux du football au moins…

Bixente Lizarazu
: « Ce tunnel est indissociable du stade, il en est la marque de fabrique. Cela me touche d’ailleurs qu’on lui consacre un article. Il méritait bien ça. Lescure représente énormément, surtout pour des joueurs comme moi, formé au club. Dans ce tunnel, on jouait la carte du « Là, c’est chez nous ! ». Nous avions commencé sous la direction de Gernot Rohr, puis continué sous Rolland Courbis avec l’interdiction de parler à l’adversaire. Nous laissions partir devant l’équipe visiteuse. Puis nous nous regroupions à l’entrée du tunnel. Et là, comme un seul homme, nous partions tous en courant en faisant bien attention à ne pas chuter (rires). Et nous rattrapions nos adversaires. Nous voulions qu’ils nous entendent, qu’ils entendent le bruit des crampons sur le sol qui n’était pas encore recouvert de cette belle moquette synthétique. Cela faisait un vacarme impressionnant. Nous les dépassions en leur faisant sentir notre souffle sur les nuques. C’était notre manière à nous de leur signifier que nous ne lâcherons rien, que nous étions tous prêts au combat, que s’ils voulaient s’imposer il leur faudrait bien venir nous chercher, qu’ici c’était Bordeaux ! Nous appliquions la même stratégie à la mi-temps ».

Didier Sénac : « Très souvent, je savais que nous avions gagné avant même d’avoir commencé à jouer, on a senti bien des joueurs se décomposer. À l’époque, il n’y avait pas de caméras que ce soit dans les vestiaires et a fortiori dans le tunnel. Il y a eu des mots, des insultes, des échauffourées, des gifles aussi, mais par respect pour les joueurs impliqués, je préfère taire les noms… On pouvait faire beaucoup plus de choses. (Rires.) Lorsque nous sommes remontés en L1 après notre rétrogradation administrative, Rolland Courbis s’est assis sur le banc en juin 1992. J’étais alors capitaine, et, avant chaque match, Rolland, étant une personne très superstitieuse, me donnait dans la main une poignée de gros sel juste avant de sortir du vestiaire. Je devais la jeter sur la pelouse quand je pénétrais sur le terrain pour chasser les mauvais esprits. Je prenais toujours le « talisman » de Rolland dans la main gauche. Sauf une fois, mais je suis incapable de dire à quelle occasion, je le prends de la main droite. Un adversaire me tend la main pour me saluer et, là, je me retrouve gêné aux entournures. Précipitamment, je passe le sel dans ma paume gauche. Je revois encore le visage du joueur me demandant : « Que fais-tu ? C’est quoi dans ta main ? » Et je m’entends encore lui répondre « T’occupe, c’est rien ! Laisse tomber » ».

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Laurent Robuschi : « À mon époque, ce n’était pas très bien éclairé, il n’y avait pas la rampe pour se tenir ni le tapis synthétique. C’était long pour certains, il y avait des invectives. »

Didier Couécou : « Le tunnel, c’était un vrai juge de paix. On faisait peur à l’adversaire, c’était de l’intimidation. Mais on n’a jamais tué personne. »

Aimé Jacquet : « Ma hantise d’entraîneur était là, il y a eu de tout dans ce tunnel. On a appris avec nos amis italiens de Naples, quand on s’est fait secouer dans le couloir là-bas, qu’il y a de petits passages en force à faire. »

La plus folle histoire, narrée dans le bel article de Sud Ouest se passe en 1982. « Bordeaux perd le titre en perdant contre Lens (0-1) sur une décision
arbitrale contestée. Au retour, dans le tunnel, le juge de touche sent
un coup de pied aux fesses, se retourne et frappe du manche de son
drapeau la tête du suspect numéro 1, le gardien bordelais Dragan
Pantelic.
Une plaie au cuir chevelu, ça saigne beaucoup. Le Yougoslave
part vite aux urgences et nie les accusations, les plaintes s’accumulent au
pénal, au sportif, Pantelic est suspendu un an. Claude Bez, furieux,
fait jouer Giresse et Trésor gardien de but à Nantes au match suivant
(6-0). »