C. Carrasso : « La nouvelle génération se contente de venir à l’heure et de repartir une fois l’entraînement fini »
joueurs. Aujourd’hui, on est redevenu une équipe avec quelques bons
joueurs et des joueurs en apprentissage, surtout pour les plus grandes
compétitions. Avant, ce que je faisais aujourd’hui, comme le cardio, ou
le renforcement musculaire, tout le monde le faisait. Aujourd’hui, en règle générale, c’est vrai que la nouvelle génération se contente de venir à l’heure et de repartir une fois l’entraînement fini. En fait, le problème, c’est qu’ils sont trop à l’heure. Ça me choque pas mais ça m’interpelle un peu. Pour un rendez-vous à 9h30 par exemple, t’en as 80% qui arrivent entre 28 et 30. En général, on a une heure entre l’heure de rendez-vous et le début de l’entraînement. Et bien, selon moi, quand t’arrives avec 20 minutes en retard et qu’une fois l’entraînement fini, tu prends ta douche et tu te barres, soit tu as un problème personnel à la maison et c’est compréhensible, il n’y a pas que le foot dans la vie, soit tu n’en fais pas assez… Quand c’est répétitif, que t’arrives en dormant à moitié, que tu fais le strict nécessaire et que tu repars de l’entraînement, ces joueurs-là resteront malheureusement dans la moyenne.
Je n’ai pas les chiffres d’aujourd’hui mais il n’y a pas si longtemps, la durée moyenne d’une carrière professionnelle était de 4 ans et demi quoi. Ça fait 17 ans que je fais du foot. Certains vont nous chambrer, Jaro (Plašil) et moi par exemple, et d’autres vont comprendre un peu le truc, vont essayer de se coller à ce travail complémentaire. Ils ne sont pas bêtes non plus les mecs hein. Quand ils captent que ça fait 15 ans que tu es au haut niveau, en faisant comme ci, comme ça, ils vont essayer. Mais en règle générale, il y a 80% des joueurs que tu ne vois même pas. Ils attendent que l’heure arrive. Toi, tu leur dis bonjour juste avant l’entraînement. Bon… Ça m’est déjà arrivé de venir juste à l’heure mais 90% du temps, j’arrive minimum 30 minutes avant l’heure de base. Je vais faire un peu de course, parce que ça me réveille ou je vais étudier une vidéo. Tu as besoin de complément. C’est vrai qu’en France, on s’est trop habitué au minimum, c’est-à-dire à l’obligation.
(…) Notre sport a évolué, les mentalités un peu moins. (…) Après, est-ce qu’on n’est pas assez en France à le faire ? Peut-être. Peut-être qu’en Angleterre, tout le groupe le fait, au PSG aussi peut-être. Quand tu vois tout le groupe le faire, t’es bien obligé de le faire aussi, je sais pas… Tu ne peux pas forcer quelqu’un à faire plus que le minimum, l’obligatoire, s’il n’en a pas spontanément envie. Si tu veux forcer quelqu’un à manger quelque chose qu’il n’aime pas, tu lui fais manger deux cuillères mais après… il va recracher. Dans le foot, c’est pareil. Mais c’est dommage parce qu’on perd énormément de talents à cause de ça. Hatem Ben Arfa, je l’ai côtoyé un peu en équipe de France. S’il a été aussi bon à Nice, c’est qu’il en a fait plus d’habitude. Je suis sûr que si on lui pose la question, il dira que oui. Il n’y a pas de secrets dans le foot. Si je n’avais fait que « l’obligatoire » , je n’aurais pas connu tous les grands joueurs avec qui j’ai eu la chance d’aller jouer, je n’aurais pas joué autant de compétitions, pratiquement toutes les compétitions possibles, je n’aurais pas eu la carrière que j’ai eue. Déjà, de base, je n’avais pas la compétence que certains pouvaient avoir, donc j’ai dû passer par le travail. Et j’essaie de tenir le plus longtemps possible. Mais ça doit venir de chacun. La nouvelle génération est difficile. Certains ne s’en rendent pas compte. C’est dommage. Ou ils s’en rendront compte trop tard. Je connais aucun grand joueur qui n’a pas bossé. »