Gaëtan Huard : « Après Videoton, je n’ai pas dormi, la culture européenne bordelaise a été bafouée »

Nouveaux bouts de notre entretien (réalisé par l’équipe de ‘Girondins Analyse’) avec Messieurs Xavier Domergue et Gaëtan Huard, samedi dernier. Hommes de terrain et de médias (beIN Sports), ils répondent à une question sur le court, trop court passage européen des Girondins de Bordeaux cette saison… L’élimination rapide, dès les tours préliminaires, par les Hongrois de Videoton fait encore mal, très mal, notamment pour l’image médiatique et les diffusions à venir du FCGB.

Domergue : « Les Girondins, on aurait bien aimé les traiter un peu plus sur la Coupe d’Europe, sur les antennes de BeIN Sports ; mais malheureusement ce n’est pas le cas. C’est triste pour le football, et c’est triste pour les amoureux des Girondins, c’est certain. Mais c’est comme ça, on verra donc quelles seront les programmations des matches des Girondins. Nous, on aurait eu beaucoup de plaisir à les avoir le dimanche, pour les suivre, les commenter, après les soirées d’Europa League le jeudi. Mais ce ne sera pas le cas. On sera quand même là, si on a la chance des les avoir le dimanche, pour couvrir leurs rencontres. »

Huard : « La médiatisation, elle change automatiquement avec cette élimination, car quand tu joues en Ligue Europa le jeudi tu sais que tu rejoues en Ligue 1 le dimanche, à 15 heures, 17 heures, car il y a un délai obligatoire de récupération minimum entre les matches. Ce sont des matches traités à part, comme des gros matches ; mais là, hormis s’ils sont bien classés, ou pour les très gros matches, les Bordelais ne seront pas prioritaires pour les diffusions décalées, étant faites par rapport aux calendriers européens, et surtout ceux de l’Europa League. Leur position médiatique est donc compromis. »

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Domergue : « Ce qui est dommage, aussi, c’est qu’on sait bien que quand on a un club français qui est en Coupe d’Europe, qui avance, qui va loin ; on s’y intéresse plus, surtout nous qui avons les diffusions des compétitions européennes, sur BeIN… Bordeaux n’aura donc pas cet éclairage-là, focalisé sur le club, avec cet intérêt supplémentaire. Mais on sait quand même tous que Bordeaux reste un nom, un club historique de Ligue 1, qui vit sa 65ème saison dans l’élite, donc ce club mérite d’être suivi, quoi que certains puissent en dire. »

Huard : « Ce dont je suis inquiet, quand même, c’est que je ne comprends pas toujours bien les choses qu’on vit… Alors on va me dire : ‘Oui, c’est compliqué’, mais je ne comprends pas qu’on soit encore européens grâce au Paris Saint-Germain qui, assuré d’être en Ligue des Champions et ayant gagné les deux coupes nationales, nous libère des places en Europa League, alors qu’on termine seulement 6ème. C’est la deuxième fois que ça nous arrive, à Bordeaux, donc ne l’oublions pas : on est européens aussi, en grande partie, grâce à Paris. Et ce que je comprends encore mois, c’est qu’on ne se soit pas plus pressé, du côté des dirigeants – alors qu’on voulait cette place européenne – pour faire un bon recrutement. Videoton, tout de même, quand on y regarde de plus près, ce n’est pas n’importe quelle équipe. Ils étaient à notre portée, mais ils avaient déjà 7-8 matches, dont des tours préliminaires européens précédents, et on les savait solides, expérimentés en Europe, avec déjà une histoire européenne. Ils ont fait une finale de C3 il y a trente ans, il faut le savoir !

Les tours préliminaires européens, de tout manière, ils ne faut pas se dire qu’on va les passer aisément : c’est du sérieux ! L’ambition, c’est de mettre tous les atouts de son côté, d’entrée, et là je trouve qu’on a tardé à le faire, niveau mercato, sur certains postes-clés de l’équipe, qu’il fallait renforcer.

Actualités : Xavier Domergue :

Sincèrement, cette élimination en Hongrie est un énorme couac et, moi qui y était, je peux vous dire que je n’ai pas dormi de la nuit – et je ne devais pas être le seul ! -, je l’ai très mal vécu… Vous aussi je pense. Bordeaux ; que ce soit à l’époque de Marius Trésor, de Claude Bez, etc ; a quand même été loin en Coupe d’Europe, en Coupe des Clubs Champions à l’époque. Et notre génération a été en finale de la Coupe UEFA 96, en faisant environ 25 matches européens, depuis l’Intertoto… On a tous gonflé l’histoire européenne du club, en apprenant énormément de choses, et là je pense que cette culture européenne bordelaise a été bafouée. Ce n’est pas normal d’être éliminé si tôt d’une compétition européenne prestigieuse. Mais on a raté le coche à l’aller, où on doit mettre 3 ou 4 buts, car on a les occasions pour. Largement. Au retour, tu peux perdre 1 à 0, chez eux… Ça arrive. Mais quand tu as les situations, il faut marquer, et en tant qu’ancien gardien je l’ai souvent constaté, car tu te fais souvent punir derrière. Même au retour, si Gaëtan Laborde met sa tête, le duel est plié. Mais après, comme il n’a pas marqué, ça ne sentait pas bon. Je l’ai vécu en jouant, ça se sent venir… Alors qu’en arrivant à 3 ou 4 à 1 dès la fin du match-aller, c’était fini, on n’en parlait plus !

Et maintenant, attention, car on va rester juste sur les compétitions nationales, dont les coupes, où on sait que ça va très vite. Sur un match, si on tombe rapidement sur des équipes qui nous sont nettement supérieures, comme Paris ou Monaco, ce sera compliqué… »

Domergue : « La saison dernière, Lille s’est fait sortir de l’Europe au même stade que Bordeaux : par les Azéris de Qabala, qu’on connaissait un tout petit peu plus que Videoton car ils passaient plus de tours européens ces dernières saisons. Mais c’était pareil, ça devient vite difficile dans la tête des joueurs, car il faut digérer cette déception, cette élimination, ce que le LOSC a eu du mal, beaucoup de mal à faire… Gaëtan a été un grand joueur, avec cet esprit de compétiteur. Là, c’était le début de la vraie compétition pour Bordeaux, avec une place en barrages puis en poule de Coupe d’Europe à aller chercher, donc on ne pouvait pas se permettre de sous-estimer l’adversaire. Ces matches comptent dans l’histoire d’un club, et à l’arrivée c’est dur – et ça me dépasse – d’entendre le président Martin avouer que Bordeaux a peut-être sous-estimé Videoton. On n’a pas le droit, quand on est professionnel, d’agir comme cela. Après, je ne pense pas que ça vienne de Jocelyn Gourvennec, qu’on connait bien et qui est aussi un compétiteur, très pro, qui avait tout joué à fond avec Guingamp, en sortant des poules de l’Europa League. Mais ce sont peut-être les joueurs qui ont mal abordé le match, et c’est problématique. »