R. Molina : « Que ce soit bancal ou pas, c’est l’opacité derrière (…) A. Yacine, c’est fascinant ! »
Dans l’émission ‘Girondins Analyse’ d’hier soir, sur la radio R.I.G (podcast complet dispo ICI), c’est Romain Molina qui était notre invité, par téléphone, en début de programme « Faisant du journalisme sans être journaliste », l’auteur de plusieurs livres liés aux coulisses du foot et à la culture autour du sport (dont ‘Galère Football Club’ ou encore ‘Cavani, el matador’) vient de poster une vidéo très intéressante sur sa chaîne Youtube (à voir ICI). Elle concerne certains dessous du rachat en cours des Girondins de Bordeaux par les fonds américains GACP et King Street, lequel inquiète beaucoup de supporters du FCGB.
En direct dans GA, Romain Molina est donc revenu sur tout cela. Retranscription :
« Déjà, et ça va peut-être surprendre beaucoup de personnes, mais ce genre de rachats c’est en fait plutôt assez logique et habituel. J’appelle ça les poupées gigognes, ou les poupées russes, c’est à dire qu’une société en englobe une autre, qui en englobe une autre et ainsi de suite, avec des ramifications dans les paradis fiscaux. Alors, je sais que ça peut choquer, car en France on ne s’intéresse malheureusement pas trop au ‘comment’, vu qu’on regarde le résultat mais qu’on oublie souvent le chemin ; comme dirait Marcelo Bielsa… Mais ces procédés sont assez courants, et comme il y a de plus en plus de rachats de clubs ça va, je pense, s’intensifier à l’avenir, d’autant que parmi ces rachats il y a beaucoup de fonds d’investissement, provenant notamment des États-Unis. Là, avec Bordeaux, c’est totalement le cas, et on est plus dans un système à la Gérard Lopez à Lille : les fonds viennent de capitaux, en prêts. Et évidemment, cela pose question, car en gros tu te demandes si toi et moi, même sans avoir une thune, on ne pourrait pas racheter ; comme n’importe qui, vu que ce sont des prêts et pas notre argent ; bien qu’il faille tout de même avoir une crédibilité sur les marchés financiers pour les obtenir.
Après, quand tu vois que tout en haut il y a King Street, un fonds vautour qui fait des prêts à 15% d’intérêts, tu te dis que bon ça va être du trading de joueurs. Est-ce que c’est vraiment le foot qu’on aime ? Je ne pense pas. Maintenant, c’est une mode qui est là, et qui devient de plus en plus grande. Donc ce qui est intéressant, que ce soit bancal ou pas, c’est l’opacité qu’il y a derrière. Mais, vous savez, un bon business, c’est un business qui est discret. Des fois, on ne connait pas vraiment les proprios. Sauf que là, il y a Alain Yacine ; et là c’est fascinant ! Parce que je suis à la recherche de qui est ce mec-là, et je peux vous dire qu’il y a des trucs… Je sais au moins qu’il existe. Aux États-Unis, il y a deux ‘Alain Yacine’ : l’un habite à Los Angeles et l’autre a un appartement à Miami, mais il serait officiellement libanais, encarté aux Républicains, ce serait un banquier d’affaires qui travaillerait au Brésil, mais tous les journalistes que je connais là-bas, et même un banquier, m’ont dit n’en avoir jamais entendu parler. Si c’est un espion ? On rigole, mais il y a plus d’un mec des services secrets dans le football… Donc des fois, vous savez…
(…) Mais ce repreneur (on venait alors de mentionner le nom de Jospeh DaGrosa, fondateur et dirigeant de GACP) ça peut être plein de choses : un homme de paille mis en figure par des mecs qui veulent rester dans l’ombre, par exemple. C’est déjà arrivé au Brésil, en 2005, avec le club de Corinthians, alors racheté officiellement par Kia Joorabchian – aujourd’hui agent de Coutinho, David Luiz, Willian, Oscar, Ramires ; un top 5 agent mondial -, mais qui était en fait un homme de paille pour des oligarques en cavale. Alors attention, je ne dis pas que là il y a un projet criminel derrière, mais que les mecs qui sont la figure de proue d’un projet peuvent être dirigés par des mecs qui, derrière, ont le pognon et n’ont pas envie de sortir. (…) Parler de ‘mafia’ ? Non… Pour le moment, il n’y a pas de mafia, enfin nous on ne peut pas le savoir. Après, est-ce que M6 et Nicolas de Tavernost peuvent vraiment savoir, potentiellement, qui il y a derrière ? Est-ce qu’ils peuvent être sûrs… ? La structure c’est : ‘une société en englobe une autre, qui en englobe une autre, etc’, donc si la société X fait une offre mais qu’en allant dans ses statuts tu vois qu’elle est administrée par une autre société, elle-même dirigée par une autre qui mène à un paradis fiscal… Alors là, tu ne peux pas savoir qui est propriétaire. A Lille, par exemple, quand Gérard Lopez a racheté le LOSC, je peux vous garantir qu’il n’y a aucune manière de savoir exactement d’où vient l’argent, à la base ; qu’il vienne d’un trafiquant d’armes comme d’un investisseur normal. Donc restons prudents. »