Matthieu Rouveyre : « L’équation semble extrêmement compliquée »
Vendredi dernier (28/09), dans l’émission ‘Girondins Analyse‘ (radio R.I.G, podcast complet disponible ICI), le conseiller municipal Matthieu Rouveyre (Parti Socialiste) revenait sur le report, décidé par Alain Juppé, maire de Bordeaux et prédisent de Bordeaux Métropole, du votre de la métropole concernant le rachat des Girondins par le fond d’investissement américain GACP.
Pour Rouveyre, cette décision raisonnable mais… inquiétante sur le sérieux de General American Capital Partners, pose beaucoup de questions, notamment celle de savoir comment Joseph DaGrosa va pouvoir changer la donne d’ici au 11 et au 12 octobre (audition par les élus et vote le lendemain) afin que les doutes sur son projet d’ensemble, encore flou, soient dissipés aux yeux de tous.
« Moi, ce que j’ai pu constater, côté puissance publique, c’est que, depuis le début, il manquait des informations pour les élus. On les a demandées depuis des semaines, je l’ai dénoncé, ça s’est rajouté aux doutes des supporters, et quand on met bout à bout toutes les informations autour de cette cession on n’est pas vraiment rassuré. (…) Je me garde bien d’être le porte-parole des élus, mais je donne mon sentiment. Et ce que fait apparaître le montage financer du rachat des Girondins, c’est que, dans l’hypothèse où le club n’arrive plus à payer son loyer pour occuper le stade – 3,85M€ par an, je rappel, contre 150 000 – 200 000 euros pour le stade Chaban-Delmas ; ou Lescure si vous préférez ; à l’époque -, c’est La Dynamie SA, société créée pour le rachat du club, qui prend le relais. Sauf que, cette société elle n’aura dans son capital que le club et des dettes. On se doute bien que si le club ne peut pas payer son loyer, La Dynamie SA, dont le capital social n’est que de 1€ aujourd’hui, ne pourra pas non plus le faire. C’est la raison pour laquelle GACP a fait une lettre d’intention disant que si le club et la Dynamie ne peuvent pas payer il paye, mais ce que je dis c’est que nous n’avons à ce jour aucun élément permettant de vérifier la surface financière de GACP, qui va emprunter de son côté à des fonds spéculatifs pour racheter le club. Donc… si jamais ça ne se passe pas bien, Fortess et King Street vont venir demander des comptes à GACP et si GACP ne peut pas leur donner d’argent ces fonds vont venir dépiauter le club… Car en face de nous, on a des gens qui font de l’argent, et pas des philanthropes venant investir pour la beauté du sport. Pour moi, la difficulté est donc là, et si demain on nous dit : ‘pas de problème, on est sûr qu’on sera payé et que le club sera pérenne, avec un projet sportif qui tient la route’, moi je ne m’opposerai pas. Je l’ai déjà dit, et je le redis : je ne suis pas contre la reprise, mais cette reprise-là nous pose des questions, et en l’état actuel des choses les élus ne pouvaient pas voter la délibération qui dégage M6 de ses engagements et propose à GACP de se substituer.
(…) Nous, on aimerait avoir le rapport de la Direction Nationale du Contrôle de Gestion, car il semblerait, d’après les informations obtenues de la conférence de presse d’Alain Juppé, que la DNCG ait un peu fait le tri dans ce montage complexe. En tout cas, les élus n’ont pas assez de documents, et je voudrais vraiment mettre la main sur ce rapport de la DNCG, pour comprendre comment ça fonctionne. (…) Bordeaux Métropole, moi, je n’y siège pas, donc je ne voterai pas, mais si l’audition de Monsieur DaGrosa est suivie, le lendemain, d’un vote au verdict négatif, cela va compliquer les choses. En tant que juriste, je dis qu’il est quand même possible pour M6 et GACP de s’entendre, mais pour cela il faudrait que la garantie qu’offre M6 soit maintenue, mais rien n’empêche M6 d’obtenir une contre-garantie de la part de GACP. Tout cela est un peu compliqué, mais pas complètement impossible si M6 est vraiment déterminé à vendre le club. Mais il est sûr que si la Métropole dit non, le signal envoyé serait très négatif et pas sûr que GACP et M6 arrivent à s’entendre sur cette ligne-là. On peut donc penser, objectivement, que cela mettrait fin à la cession telle qu’elle est envisagée aujourd’hui.
Parce que, que dit Alain Juppé dans sa conférence de presse ? Il dit qu’il n’avait pas vu tout ça. Pourtant, il a bien reçu Joseph DaGrosa et lui a posé des questions. On se souvient qu’après cet entretien, il disait même que cette reprise était une chance pour le club. Et là, après avoir eu en sa possession le rapport de la DNCG, comme il semble l’indiquer dans sa conférence de presse, il a des informations semblant contradictoire avec ce que Monsieur DaGrosa lui a dit, l’amenant à changer d’avis. Ce n’est pas neutre, quand même… Alain Juppé dit, notamment, qu’il n’avait pas vu la réduction de 10M€ des dépenses du club, dont on peut penser qu’elle vise la masse salariale, et peut-être le personnel. Alors, si il voit ça dans le rapport de la DNCG mais que Monsieur DaGrosa ne le lui avait pas dit, quelle conséquences cela va avoir ? Moi, je crois que Monsieur Juppé n’est pas prêt à assumer d’être ‘complice’, en quelque sorte, d’un éventuel plan social. En tout cas, avec le report du vote de la Métropole, si le voyant d’Alain Juppé reste à l’orange, on peut penser que ce n’est pas bon pour GACP. Mais quelle marge de manœuvre a, aujourd’hui, GACP pour modifier en quelques jours un business plan présenté à King Street et Fortress pour obtenir leur accompagnement financier ? L’équation semble extrêmement compliquée. Il ne faut quand même pas être un expert en finance pour voir que l’équation proposée par Monsieur DaGrosa ne tient pas la route, à moins qu’il revoit son plan ; mais dans ce cas-là, il devrait mettre des moyens supplémentaires… En attendant, aujourd’hui, on ne voit pas comment ça peut fonctionner.
Oui, les droits télés vont augmenter d’ici 2020, de 15 à 20M€ par an pour les Girondins. Mais ils vont aussi augmenter pour tous les clubs. On ne peut pas déconnecter résultats sportifs et financiers, mais on sait que de bons résultats sportifs ne suffisent pas à avoir de bons résultats financiers… Et on sait surtout que de mauvais résultats sportifs entraîneront des déficits. Donc GACP ne peut pas se désintéresser du sportif, car si l’objectif c’est de revendre le club dans 5 ans, il va falloir le valoriser, et sans projet sportif ils ne pourront pas relever le défi financier qu’ils se lancent et générer de la rentabilité. Après, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, et je ne veux pas en être un. Si Monsieur DaGrosa vient pour expliquer qu’il y a un projet sportif et que des gens s’y connaissant mieux que moi en la matière estiment qu’on peut avoir confiance en son projet sportif, alors il n’y aura pas de raison de s’opposer à cette vente, surtout si, d’un autre côté, les garanties sont là pour le loyer du stade versé à la puissance publique. Je regrette qu’en France on ne trouve pas d’investisseurs pour prendre ces responsabilités, mais que le repreneur soit américain je m’en fiche. L’intérêt premier, cela doit être celui du FC Girondins de Bordeaux, et si Monsieur DaGrosa convainc les élus avec ses explications, alors ok. Mais je ne vois pas comment il pourra, en quelques jours, parvenir à changer des choses pour les convaincre. Mais je ne demande qu’à être démenti et convaincu. »