C. Dugarry : « Ma famille ne voulait pas que la France gagne, pour que je reste seul champion du monde »
Ce weekend, Canal + a diffusé un entretien avec Laurent Koscielny, défenseur central d’Arsenal (33 ans, 51 sélections en Bleu), qui a dû annoncer sa retraite internationale, alors qu’il se remet d’une rupture du tendon d’Achille qui l’a très probablement privé du Mondial 2018 en Russie, gagné par les Bleus. Au cours de cette interview, le joueur explique notamment qu’il a voulu que les Bleus… perdent et que ses sentiments étaient mitigés car le regret d’avoir raté ça est immense.
En réaction à ce témoignage très fort, l’ancien attaquant girondin Christophe Dugarry, qui a lui eu la chance d’être champion du monde 98 et d’Europe 2000, se montre pour le moins compréhensif :
« Ce qu’a dit Laurent Koscielny, oui, ça m’a ému, c’est mon coup de cœur. Il s’est livré, ce n’était pas facile. Ce ne sera sans doute pas compris par tout le monde, mais au moins il a dit ce qu’il pensait et ressentait, sans aucune arrière-pensée ni mensonge… Le double sentiment qu’il a eu, de vouloir que la France gagne mais aussi qu’elle perde, il peut arriver. (…) Malheureusement pour lui, ce cas-là, ça a été : ‘Bienvenue dans la vraie vie’. On a l’impression que les footballeurs sont toujours un peu en dehors de la vie réelle – ce qui est souvent le cas, il faut le reconnaître -, mais quand tu es en difficulté, tu es souvent seul. Koscielny a été honnête et franc de le dire, même si beaucoup ne vont pas comprendre. Sa réaction est totalement humaine et peut s’expliquer. Moi, ça ne m’a pas posé de souci de partager le titre de champion du monde avec cette équipe-là, parce que j’ai gardé ce titre, mais si on m’avait dit qu’on me l’enlevait pour le donner aux autres ; là je n’aurais pas voulu qu’ils soient champions du monde, moi non plus… Bien évidemment.
Quand tu vois cette équipe soulever la coupe et que toi aussi tu aurais pu, et même tu aurais dû faire partie d’eux et que le destin t’en a privé, tu as ce sentiment, égoïste certes, de penser à ta pomme, même si c’est un sport collectif. Ce qui est révélateur, c’est que quand on est hors de cette équipe on n’est plus rien en fait… Et il a aussi dû ressentir ça, ce vide, même s’il avait été invité par le président Macron à la finale. (…) En tout cas, je peux comprendre son sentiment. Moi, par exemple, les membres de ma famille ne voulaient pas que la France gagne, pour que je reste seul champion du monde ; alors que moi, non, ça ne me posait pas de problème de partager ça ! C’était un plaisir. Enfin, un plaisir, pas vraiment, mais quand même un peu ! On partage le gâteau, il n’y a pas de victime. Sauf que, pour Laurent Koscielny, c’est peut-être le plus grand échec de sa vie, car il aurait dû être champion du monde et ne le sera jamais… Comme pour les six écartés de 98, qui ont dû rentrer chez et eu du mal à s’en remettre et pour qui, chez certains, c’est encore un déchirement aujourd’hui, ils ne s’en sont pas véritablement remis. En tout cas, ce qu’a dit là Koscielny il n’y a même pas à le critiquer : c’est un sentiment qu’il a eu et qu’il explique, il le partage, et pas de problème. Je trouve même ça courageux. Après, je n’accuse personne sur ce coup en disant que l’équipe de France s’est mal comportée ou que Didier Deschamps n’a rien fait du tout pour le soutenir, mais je comprends ce que dit Koscielny, c’est humain. Il dit qu’il a préféré, à un moment, que la France perde pour ne pas avoir ce regret éternel, cette frustration-là, cette énorme douleur. Voilà, ça lui est passé en tête, il voulait ne pas avoir cette douleur… Après, je comprends aussi ceux qui sont choqués, car Koscielny ne pense qu’à sa pomme, et il l’avoue, mais c’est juste humain comme sentiment. »