Cédric Anselin : « Le problème, c’est que nous ne sommes pas assez honnêtes avec les jeunes »

Dans Ouest-France, l’ancien footballeur pro ayant débuté aux Girondins de Bordeaux, Cédric Anselin, raconte à nouveau son histoire, dont il s’est donné le devoir de parler. Tombé en dépression après une carrière qui a mal tourné et divers aléas de la vie, cet ancien espoir a même failli se suicider et veut que son cas serve à sensibiliser les gens sur les mauvais côtés du football.

« Une personne de ma famille falsifiait des documents dans mon dos pour s’offrir des voitures, une maison, des voyages. Ma dette était montée à plus de 300 000 €. J’ai dû vendre mes appartements, ma maison, et délaisser ma carrière pour payer mes dettes. Le père de ma femme était responsable d’un bar dans un camping ; il m’a proposé un boulot. Pendant deux ans, nous avons vécu dans une caravane. C’était difficile. Je suis tombé en dépression. J’ai commencé à boire et à manger n’importe quoi. L’alcool, c’est allé jusqu’à l’addiction. Je me levais le matin et je buvais. Je ne voulais voir personne. J’avais peur que les gens se rendent compte que quelque chose ne tournait pas rond. Ma dépression a duré quatorze ans. J’ai été un comédien pendant toutes ces années car je prétendais être heureux. Mon épouse savait que ça n’allait pas mais je ne lui disais pas tout. J’avais honte et peur que personne ne me comprenne.

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(…) J’ai été hospitalisé pendant un mois et demi. Le premier pas a été d’accepter cette maladie, la dépression. Le deuxième, de changer ma vie : ne plus boire, faire une activité qui me plaît. Je me suis remis à jouer au football, à 39 ans. Une heure trente où j’étais libre dans ma tête, libre de me focaliser uniquement sur mon match. J’ai reperdu les quinze kilos que j’avais pris. C’était un combat de tous les jours. Je me suis aussi promis d’aider les gens, car cela peut arriver à n’importe qui, n’importe quand. Je vais donc dans des collèges, des clubs de foot… J’ai beaucoup plus de satisfaction à aider ceux qui ne vont pas bien que d’avoir joué devant 90 000 personnes.

(…) Le problème, c’est que nous ne sommes pas assez honnêtes avec les jeunes. On leur promet beaucoup de choses, mais on ne les prépare pas à un éventuel échec. Dès l’entrée en centre de formation, il devrait y avoir un suivi psychologique car il y a déjà une cassure familiale. Ensuite, aussi, pour ceux qui deviennent « pro » comme pour ceux qui ne le deviennent pas, c’est brutal. Le foot, c’est une bulle, et si elle éclate, on se dit qu’il n’y a plus rien. Moi, à l’époque, c’était  : « Tu passes professionnel ou tu rentres chez toi. » Aujourd’hui, il y a plein de passerelles pour rester dans le milieu du sport. J’essaie de faire comprendre cela aux jeunes. À eux, aussi, de travailler sur le terrain et en dehors. Il faut qu’ils passent leurs diplômes. Dans le foot, une blessure ou autre et votre carrière peut s’arrêter. »