Aurélien Tchouaméni, une révélation attendue qui tombe à pic pour Bordeaux

Il n’a encore que 19 ans (né le 27 janvier 2000), mais Aurélien Tchouaméni fait parler de lui à Bordeaux depuis déjà quelques années. Au centre de formation des Girondins depuis ses 11-12 ans, le milieu de terrain international français en U16, 17, 18, 19 et 20 a été médiatisé notamment par son rôle dans le parcours des U19 bordelais champion de France en 2017 (génération des Jules Koundé et Zaydou Youssouf, plus Yassine Benrahou, Michaël Nilor, Thomas Carrique ou encore Gaëtan Poussin et Over Mandanda), mais aussi du fait des rumeurs très précoces selon lesquelles les plus grands clubs étrangers (Inter Milan, Bayern Munich, Arsenal, Milan AC) le suivaient. C’est probablement car ces rumeurs avaient du fondement que les Girondins l’ont très vite fait signer pro (fin 2017, à 17 ans) et l’ont même prolongé d’un an (en 2018, jusqu’en juin 2022) avant qu’il ne débute en pro.

Comparé à Paul Pogba avant même que le grand public l’ait vu jouer, auteur de quelques déclarations pleines d’assurance et d’ambition, puis vanté aussi de façon très forte par Gustavo Poyet quand il a été apte à débuter en pro mais que le coach uruguayen – pas resté assez longtemps pour le faire – attendait le bon moment de l’installer dans son équipe, Tchouaméni, abonné aux sélections avec les Bleus, était donc ‘teasé’ comme LA « pépite » de sa génération, du moins à Bordeaux. Plus encore que ses amis Jules Koundé et Zaydou Youssouf, qui déjà eux montraient de belles promesses. Ainsi, les attentes étaient grandes autour de lui, surtout chez les supporters qui rêvaient de vite admirer un milieu complet, physique et technique, intelligent dans le jeu, capable de récupérer, de créer du jeu voire parfois d’être passeur décisif et de marquer… Forcément, quand on compare quelqu’un à Pogba, on suscite des espoirs. Et parfois (souvent ?) trop.

« De veilles habitudes, qu’il commence à perde »

Sauf que la réalité a évidemment été plus rude. Des allers-retours club-sélection, des pépins physiques, des blessures musculaires ; dont une fracture du péroné en mars 2019, ainsi que – tout simplement – le temps d’adaptation nécessaire à un jeune pour se révéler en pro ; qui plus est dans une équipe et un club très instables (changements de joueurs, de coaches, de dirigeants) ; ont été la routine de la première saison en pro du natif de Rouen. Un tableau décevant donc, comme la plupart de ses matches et bouts de matches, où le N°17 – qui a pris le N°8 cette saison – semblait tendre et inconsistant sur la durée d’un partie, mais aussi lent dans ses décisions. Heureusement, le potentiel décrit par tous était bien là et commence enfin à se voir clairement, surtout ces dernières semaines, sous Paulo Sousa !

Bon voire très bon, notamment dans son inattendu duo avec le Brésilien Otávio au cœur du 3-4-3 flexible du technicien portugais, Tchouaméni est performant et parait déjà presque un titulaire à part entière, même s’il n’a que 19 printemps et une trentaine de matches en professionnel. Seulement… Mais en quelques semaines, sa progression et le cap qu’il a franchi dans le jeu crèvent les yeux. Pourtant, c’est le fruit d’un long travail de l’ombre expliquait le ‘professeur’ Sousa en conférence de presse dernièrement :

« Aurélien, il doit surtout montrer une meilleure compréhension du jeu et de l’occupation de l’espace, surtout avec le ballon. C’est là quelque chose que l’on travaille beaucoup et il a déjà progressé, mais il avait de veilles habitudes, qu’il commence à perde. Il doit changer des choses encore, mais il l’a déjà fait, même si quand il arrive dans la zone de confort il oublie… Mais c’est normal, car son cerveau le fait revenir à ce qu’il faisait avant, donc il doit continuer, s’améliorer, et beaucoup travailler sur ça. Mais sur ces derniers matches, il est très bon, surtout avec le ballon. Maintenant, il doit faire mieux aussi sur la capacité à changer de vitesse, avec et sans ballon, appuyer plus vite pour trouver les espaces. C’est un joueur qui peut donner encore plus et avec qui on travaille beaucoup, pour qu’il puisse aussi arriver plus vers la surface adverse. Parfois, il a déjà été très proche de faire des buts et il peut le faire. Mais il reste humble, il travaille, il est intéressé pour apprendre, faire mieux, alors il arrivera à un autre niveau et il a déjà progressé et je crois qu’il a encore un bon chemin pour atteindre un meilleur niveau. »

« J’ai un contrat jusqu’en 2022, donc dans ma tête je suis aux Girondins jusqu’en 2022 ! »

Pour sa part, dans un entretien livré à Sud Ouest ces derniers jours, le joueur – qui revendique d’avoir été bien managé par Sousa ; lui-même ancien grand milieu de terrain ; et encense son entourage, notamment familial – affirmait un attachement personnel aux Girondins et le discours de quelqu’un voulant se stabiliser et grandir avec son club formateur :

« Enfant, j’étais supporter. J’étais même abonné avec mon père la saison du titre (2008/2009), puis la suivante avec les matchs de Ligue des Champions. J’ai vite eu une relation forte avec les Girondins. J’étais vraiment content d’intégrer le club. (…) Je fais saison par saison, on verra en juin. J’ai un contrat jusqu’en 2022, donc dans ma tête je suis aux Girondins jusqu’en 2022 !« 

Seulement voilà. Alors que le football va actuellement bien aux Girondins – 4èmes de Ligue 1 après 14 journées – mais que le club est plombé par des conflits à sa tête entre les fonds d’investissement américains qui le possèdent depuis un peu plus d’un an, on est légitimement en droit de se demander si l’éclosion en cours du jeune Aurélien Tchouaméni va plus profiter au FCGB d’un point de vue sportif ou d’un point de vue financier. Le mercato d’hiver approchant et King Street (détenant 86.4% du club) voulant reprendre la main par rapport à General American Capital Partners (13.6%, mais gestionnaire depuis le départ) afin de générer du profit rapide, la moindre belle offre pour un talent de l’effectif sera étudiée de près en janvier 2020… De son côté, et toujours pour Sud Ouest, Tchouaméni préférait logiquement botter en touche : « C’est flatteur d’être suivi par de grands clubs, mais je n’y pense pas, je relativise. Et puis, dans le foot, tout va très vite. Aujourd’hui, je suis observé mais demain, je serais peut-être oublié ». S’il continue ses performances actuelles, pas sûr qu’on l’oublie de sitôt ; à Bordeaux et/ou ailleurs.