Daniel Riolo pousse un coup de gueule contre « la schizophrénie concernant les supporters »
Suite aux incidents de ce weekend, après Lille – Montpellier (1-1), où quelques centaines de supporters du Lille OSC ont envahi la pelouse pour s’en prendre – verbalement et physiquement – aux joueurs lillois et aux dirigeants ; alors que le club est 19ème de Ligue 1 et menacé aussi de relégation administrative ; de nombreuses réactions se font entendre de toute part sur le sujet des supporters de foot en France.
Voici, notamment, celle de Daniel Riolo (RMC), développé longuement dans ‘L’After Foot’, hier soir :
« Je vais revenir sur l’indignation qu’on a entendue un peu partout. Non, ce ne sont pas des hooligans qui ont envahi la pelouse. Les hooligans, ils se tapent contre d’autres hooligans dans des batailles organisées qui relèvent de la barbarie urbaine. Mais il faut essayer de comprendre et d’analyser ce qui s’est passé, en disant bien, en préambule, que la violence physique ne se justifie pas. En rien. Ce qui s’est passé à Lille, non seulement ce n’est pas rare dans le football mais on pourrait même le voir de plus en plus : c’est quand le social rencontre l’économie et que ça peut produire un choc. Quand la violence du peuple rencontre la violence économique… On l’a aussi vu ailleurs, à l’étranger, et on pourrait le revoir encore ailleurs, aussi… Quand on prend pour des cons les supporters d’un club, parfois même d’un club historique, avec des investisseurs, des spéculateurs irresponsables qui viennent jouer au Monopoly et qui tuent un club et coulent ce qui est, à la base, une institution populaire, ça peut dégénérer. Le foot, c’est un fait social, étudie et raconté par des sociologues et des écrivains, suivi par des tonnes de gens dans le monde car c’est là le sport le plus populaire. Et quand je dis qu’il faut arrêter avec la schizophrénie concernant les supporters je parle d’abord des dirigeants et des joueurs qui draguent, allument, et sanctionnent parfois les supporters ; bien qu’ils en aient quand même besoin pour encourager et remplir les stades ; mais aussi des médias qui montrent toutes les belles ambiances et les images de tribunes avec ‘les cons qui viennent chanter’, ceux sans qui il n’y a pas d’ambiance, malgré les autres personnes venant au stade… Les supporters font partie du spectacle, et je redis qu’il faut trouver un moyen de sanctionner les excès sans condamner tout le monde par des huis-clos et des fermetures de tribunes.
(…) Le supporter, dans le fond, c’est quoi ? De quoi on a envie ? Juste d’un pantin, pour le ‘vrai’ supporter, et d’un client pour l’autre ; bon à acheter la place, le maillot et le hot-dog. Par rapport à ça, sauf en cas de hooliganisme et de violence, je n’accepte pas – jamais – l’idée qu’on dise que les supporters sont les seuls responsables des débordements, quand il y en a. (…) Il va falloir qu’on trouve une place, je ne sais pas laquelle, pour les supporters. En aucun cas ce ne sera : ‘Viens, chante et ferme ta gueule’. Ça n’a jamais été ça, ça ne sera jamais ça. On nous dit toujours que le football est un business et le club une entreprise, alors est-ce que les supporters doivent être vus comme un syndicat ? Peut-être, oui, mais il faut alors trouver un moyen d’expression sans violence. Après, je n’ai jamais été pour que les supporters gèrent les clubs, car leurs idées ne sont souvent pas bonnes et leurs réactions sont faites sous le coup de la passion, ni pour qu’ils se prononcent sur la politique sportive du club. Chacun doit rester à sa place. Mais, en même temps, quand tu te fous de leur gueule – comme là à Lille -, ils doivent être là, et sont là, pour le dire.
Mon avis tranché du soir est long, mais il est important et me tient à cœur. Je termine en disant qu’il ne faut pas oublier que les supporters sont un actif économique du club. A Saint-Étienne, vu les résultats depuis les années 80, la richesse de ce club c’est en grande partie son soutien populaire. Sans ça, je pense même que l’actif des Verts serait zéro et que s’il existe encore c’est grâce à ça. A Lens, aussi ! Si Lens est toujours diffusé même en étant dans les choux en Ligue 2, c’est pour quoi d’après vous ? Donc voilà, nier l’actif économique que représentent les supporters serait une erreur. Et il parait qu’on veut organiser des réunions sur la place du supporter… Mais qu’on continue, et je suis dispo pour en parler, comme pas mal de spécialistes, qui connaissent mieux le sujet que certaines personnes s’exprimant sur ça, mais qui sont larguées depuis très longtemps. »